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0032 02 7322568Michelle Bachelet : « Les États doivent cesser de nier le racisme et mettre fin à l’impunité »
Dans le combat pour l’éradication du racisme systémique, les États doivent tout d’abord commencer à cesser de l’ignorer, souligne Michelle Bachelet, la Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme.
« Je demande à tous les États de cesser de nier le racisme et de commencer à le démanteler, de mettre fin à l’impunité et d’instaurer un climat de confiance, d’écouter les voix des personnes d’ascendance africaine, d’affronter les séquelles du passé et d’offrir des réparations », a-t-elle dit dans un communiqué.
Selon elle, « seules les approches qui s’attaquent à la fois aux lacunes endémiques des forces de l’ordre et au racisme systémique - et à ses origines - rendront justice à la mémoire de George Floyd et de tant d’autres dont la vie a été perdue ou irrémédiablement affectée ». « Le statu quo est inacceptable », a déclaré Mme Bachelet lors de la publication d’un rapport du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) demandé par le Conseil des droits de l’homme de l’ONU.
190 décès examinés dont ceux de George Floyd ou du Français Adama Traoré
Pour l’ancienne Présidente chilienne, il s’agit d’adopter une approche globale et non pas fragmentaire pour démanteler des systèmes ancrés dans des siècles de discrimination et de violence. « Nous avons besoin d’une approche transformatrice qui s’attaque aux domaines interdépendants qui alimentent le racisme et conduisent à des tragédies récurrentes tout à fait évitables, comme la mort de George Floyd », a-t-elle ajouté, relevant « l’importance capitale de marquer un tournant pour l’égalité et la justice raciales ».
Le 25 juin, Derek Chauvin, le policier blanc qui avait asphyxié et tué George Floyd, a été condamné à 22 ans et demi de prison. Le Conseil des droits de l’homme avait chargé l’année dernière Mme Bachelet de se pencher sur le racisme systémique après le meurtre de George Floyd et les manifestations de masse du mouvement Black Lives Matters qui ont suivi dans le monde entier.
Les équipes de Mme Bachelet ont donc examiné 190 décès de personnes d’ascendance africaine dans le monde, attribués aux forces de l’ordre.
Le personnel du HCDH a aussi dialogué avec les proches de sept victimes, dont ceux de George Floyd ou du Français Adama Traoré. Il a également étudié dans le détail les cas des meurtres de Luana Barbosa dos Reis Santos et João Pedro Matos Pinto (Brésil) ; Breonna Taylor (États-Unis) ; Kevin Clarke (Royaume-Uni) ; Janner (Hanner) et García Palomino (Colombie).
Excès de surveillance policière à l’égard des populations noires
Les équipes de Mme Bachelet ont aussi discuté avec 340 personnes et les représentants de 110 États. Lors de l’examen des décès imputables aux forces de l’ordre dans différents pays dotés de systèmes juridiques variés, le rapport a constaté des tendances et des « similitudes frappantes », notamment en ce qui concerne les obstacles que rencontrent les familles pour accéder à la justice.
Les personnes d’ascendance africaine et leurs proches subissent « un impact disproportionné et discriminatoire» des forces de l’ordre et de la justice, a affirmé la Haut-Commissaire dans son rapport. Elles sont notamment ciblées lors de délits mineurs, de contrôles et d’interpellations mais aussi d’actions sur la santé mentale et de dispositifs anti-drogue. Dans la plupart des cas, les personnes tuées ne constituaient pas de menaces pour la police.
Le rapport fait également mention d’inquiétudes face à « l’excès de surveillance policière à l’égard des personnes et des populations noires. Ce qui les fait se sentir davantage menacées que protégées », citant la comme problème majeur le fait de traiter les enfants comme des délinquants.
Marginalisation économique et politique
Dans ce contexte d’« excès de surveillance policière à l’égard des personnes et des populations noires », bon nombre des familles des personnes décédées à la suite d’une interaction avec les forces de l’ordre se sont également senties « continuellement trahies par le système » et ont exprimé un « profond manque de confiance ».
« Plusieurs familles m’ont décrit leur agonie dans leur quête de vérité, de justice et de réparation, ainsi que la présomption affligeante selon laquelle leurs proches l’avaient en quelque sorte "mérité" », a fait valoir Mme Bachelet, estimant que « cela doit changer ».
Plus largement, ce racisme systémique se traduit aussi, pour les populations d’ascendance africaine, par « une marginalisation économique et politique ». « Les personnes d’ascendance africaine n’ont pas le même accès que les autres à l’éducation ou à des soins de santé de qualité, ou se retrouvent sous-représentées dans la société », souligne le rapport du HCDH qui exhorte les États à « adopter des mesures mobilisant l’ensemble des pouvoirs publics, avec des plans dotés de ressources suffisantes ».
L’ONU favorable à des « excuses » et à un mécanisme de suivi
Et pour y arriver, « les États doivent faire preuve d’une plus forte volonté politique pour accélérer l’action en faveur de la justice, de la réparation et de l’égalité raciales, en prenant des engagements spécifiques et limités dans le temps pour obtenir des résultats ». Il s’agit ainsi « de réimaginer le maintien de l’ordre et réformer le système de justice pénale, qui ont eu constamment des effets discriminatoires pour les personnes d’ascendance africaine ».
Sur un autre plan, Mme Bachelet a appelé le Conseil des droits de l’homme à instaurer un mécanisme spécifique limité dans le temps ou de renforcer un mécanisme existant en vue de promouvoir la justice et l’égalité raciales dans le contexte de l’application de la loi partout dans le monde.
Plus généralement, la Haut-Commissaire a insisté sur l’importance de « démystifier les faux récits qui ont fait qu’une succession de politiques et de systèmes discriminatoires sur le plan racial a perduré et qui ont permis aux personnes et aux gouvernements de nier à la fois ce qui se passe encore aujourd’hui et ce qui s’est passé dans le passé ». « Seules les approches qui s’attaquent à la fois aux lacunes endémiques des forces de l’ordre et au racisme systémique – et à ses origines – rendront justice à la mémoire de George Floyd et de tant d’autres dont la vie a été perdue ou irrémédiablement affectée », a insisté la cheffe des droits de l’homme de l’ONU.
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