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0032 02 7322568Des acteurs du changement provenant de la rue défendent les droits des enfants
Des acteurs du changement provenant de la rue défendent les droits des enfants
« Nous vivons de façon vraiment différente par rapport à la plupart des gens. Alors que pour les autres, la rue n’est qu’un lieu de passage pour aller au travail, c’est là que nous habitons », a tenu à expliquer Priya*. « Si vous n’y vivez pas, vous pouvez difficilement comprendre la réalité à laquelle nous sommes confrontés jour après jour. »
Pour Priya, 17 ans, et Rani*, 18 ans, la journée commence typiquement tôt le matin. Comme beaucoup d’enfants et de jeunes vivant à Kolkata, en Inde, les deux amies se réveillent au son des rues animées et se préparent pour la journée. Elles rangent leurs affaires de couchage et enlèvent les bâches en plastique qu’elles ont accrochées la veille pour les protéger de la pluie.
« Il y a quelques écoles à proximité et quand les enfants arrivent, leurs parents nous regardent parfois d’un air mauvais en nous disant de partir », a raconté Rani. Les filles répondent généralement par un haussement d’épaules et continuent leur routine avant de se préparer pour l’école.
« Même si les autres nous regardent parfois d’un mauvais œil, car nous occupons un espace qui ne nous appartient pas, le fait de vivre dans la rue nous donne un sentiment de liberté et de puissance, et on se sent capables de surmonter n’importe quel problème, avec l’aide de nos "oncles" policiers, de nos enseignants et de ceux qui nous soignent », a-t-elle ajouté.
Priya est en 11e année dans un établissement scolaire réputé de Kolkata. Rani est également en 11e année, dans une école anglophone du quartier. Après les cours, généralement vers 14 heures, les filles prennent leur repas de midi et passent du temps avec leurs amis dans la rue, tout en ayant l’œil sur les vélos et les voitures, et en surveillant leurs jeunes frères et sœurs qui jouent dans la rue.
Le soir, juste après avoir terminé leurs devoirs, les filles aident parfois leurs parents, qui tiennent des étals au bord de la route, à compter leur recette de la journée. Elles aident aussi leurs frères et sœurs, ainsi que d’autres enfants plus jeunes de leur communauté à faire leurs devoirs et, certains jours, en particulier les week-ends, elles se réunissent avec leurs pairs pour essayer de trouver des solutions à leurs problèmes. Elles attendent que les gens qui travaillent dans le quartier rentrent chez eux et que les rues se vident pour pouvoir enfin se réapproprier les rues et s’installer pour la nuit.
Priya et Rani n’ont pas de maison où rentrer à la tombée de la nuit. Comme une multitude d’autres enfants dans le monde, elles ont un lien étroit avec la rue : c’est là qu’elles vivent, que leurs parents travaillent et qu’elles passent du temps avec leurs pairs.
Chaque année dans le monde, la moitié des enfants subissent des violences. Ces violences sont le lot quotidien des enfants des rues, y compris dans les pays « les plus riches ». En raison des inégalités économiques, les enfants quittent leur foyer pour trouver du travail afin de subvenir aux besoins de leur famille. La rue peut sembler plus sûre pour les enfants qui fuient la violence, la maltraitance, l’exploitation et la négligence. D’autres sont parfois contraints de quitter leur foyer et leur communauté et se retrouvent à la rue en raison d’un conflit, d’une famine ou même d’une catastrophe naturelle.
Défendre ses pairs
Contrairement à beaucoup de leurs pairs vivant dans la rue, Priya et Rani vont à l’école tous les jours. Toutes deux fréquentent des établissements scolaires privés dont les frais de scolarité annuels et les fournitures scolaires sont payés en partie par leur famille et complétés par une ONG. Ce qu’elles apprennent à l’école, les filles le partagent à leur tour avec leurs amis de la communauté qui ne peuvent pas bénéficier d’une éducation formelle.
Child in Need Institute (CINI) est une organisation non gouvernementale qui travaille depuis 50 ans avec des enfants issus des communautés les plus vulnérables en Inde. CINI promeut un processus démocratique d’encadrement par les pairs pour intégrer la centralité et l’intersectionnalité des adolescents afin de prévenir les inégalités et la discrimination au sein des familles, des communautés, des systèmes et des politiques.
Ainsi, chaque communauté dispose d’un groupe centré sur les enfants, et Priya et Rani ont montré la voie à suivre et sont désormais considérées comme des « championnes de la rue ». Elles sont devenues des modèles dans leur communauté et des défenseuses des droits des enfants pour que ces derniers aient leur mot à dire dans les décisions qui sont prises à leur sujet aux niveaux communautaire, national et international.
À la fin du mois d’octobre 2024, elles ont participé à une manifestation parallèle sur la violence contre les enfants ayant des liens avec la rue lors de la première Conférence ministérielle mondiale sur l’élimination de la violence à l’égard des enfants, qui s’est tenue à Bogota, en Colombie.
« Les plus grands obstacles que doivent surmonter les enfants en situation de rue concernent le fait d’être reconnus en tant que détenteurs de droits et traités comme tel, d’avoir les mêmes droits que tous les autres enfants, et de faire face à l’opinion que leur entourage a d’eux et au traitement qui leur est par conséquent réservé », a déclaré Imma Guerras, Cheffe de l’équipe des droits des enfants et des jeunes du HCDH, lors de la conférence.
« Il est important de passer du statut de victime à celui d’acteur du changement », a-t-elle ajouté. « Les enfants prennent part à de nombreuses activités dans la rue et, s’il y a un "problème", ce n’est pas l’enfant qui échoue, mais le système qui ne parvient pas à soutenir l’enfant. »
En 2017, après avoir mené des consultations auprès de plus de 300 enfants dans 32 pays, le Comité des droits de l’enfant a publié son observation générale no 21 sur les enfants en situation de rue. Ce document offre aux États des orientations détaillées sur la manière de mettre en œuvre les droits des enfants en situation de rue, en vertu de la Convention relative aux droits de l’enfant. L’observation générale traite des causes complexes et des besoins uniques des enfants qui passent beaucoup de temps dans la rue ou qui ne bénéficient pas d’un environnement familial sûr, ainsi que des mesures de protection de leurs droits.
Comme l’indique le document, les enfants ayant des liens avec la rue doivent pouvoir accéder à l’éducation et à un logement convenable, être protégés contre les abus et l’exploitation, bénéficier de services de santé physique et mentale, avoir accès à la justice et leurs points de vue et leurs opinions, comme tous les autres enfants.
Le Comité recommande que les enfants en situation de rue participent activement aux processus décisionnels concernant leur vie, notamment en les associant à l’élaboration des politiques, des programmes et des services destinés à répondre à leurs besoins. Il conseille également aux États de ne pas incriminer les enfants en situation de rue ou qui adoptent certains comportements pour survivre dans de telles situations, et d’adopter des lois et des politiques visant à protéger leurs droits et qui mettent l’accent sur le soutien plutôt que sur des mesures punitives. En outre, le Comité encourage la coopération internationale pour s’attaquer aux facteurs transnationaux qui contribuent aux situations de rue, dont la migration, la traite des êtres humains et la pauvreté transfrontalière.
Dans l’ensemble, l’observation générale no 21 appelle à une approche compatissante, centrée sur les droits, qui réponde à la fois aux besoins immédiats et aux changements systémiques à long terme afin d’autonomiser les enfants en situation de rue. Elle souligne l’importance des politiques inclusives, de la non-discrimination, de la protection, de la participation et de l’accès aux services pour améliorer la qualité de vie de ces enfants et faire respecter leurs droits.
Lors de cet événement, Priya et Rani ont exhorté le Gouvernement indien et les autorités locales à associer les enfants aux décisions qui concernent leur vie.
« Nous connaissons bien les problèmes auxquels nous sommes confrontés quotidiennement et nous pouvons aider les adultes à trouver des solutions pour nous protéger et nous soutenir », a déclaré Priya. « La nuit, quand nous essayons de dormir, nous devons souvent faire face à différents types de dangers : nous sommes plus vulnérables à ce moment-là, et certains passants nous touchent de manière inappropriée pendant que nous nous reposons. Nous méritons d’être en sécurité pendant que nous dormons, comme tout le monde. »
Les deux jeunes filles estiment qu’il devrait y avoir des espaces spécialement dédiés aux enfants, où leurs droits seraient respectés, et des environnements favorables qui les protégeraient de la violence et où ils pourraient demander de l’aide, sans craindre d’être séparés de leur famille. « Quand on parle de ces questions, les gens nous disent d’aller dans des foyers pour enfants, mais nous avons des familles qui nous aiment et s’occupent de nous. Nous voulons rester avec nos parents, nos frères et sœurs et nos grands-parents, comme n’importe quel autre enfant qui a un toit au-dessus de la tête », a ajouté Priya.
Pour le HCDH, l’opinion des enfants ayant des liens avec la rue, comme Priya et Rani, doit sous-tendre les politiques, les projets et les interventions conçus pour répondre à leurs besoins, a déclaré Imma Guerras.
« Nous risquons parfois de ne pas pouvoir faire face à nous seuls à la violence que nous rencontrons dans notre vie, mais, ensemble, nous pouvons faire changer les choses. Nous savons qu’il est parfois difficile de faire face seul à la violence », a déclaré Rani. « C’est parfois insupportable et nous nous sentons souvent impuissants. Mais avec de l’aide et en collaborant avec d’autres, nous pensons qu’un changement significatif est possible... Nous voulons faire partie de la solution. »
* Prénoms fictifs
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